Le choix du textile est une étape primordiale pour créer sa collection de mode. En effet, pour passer d’un croquis à la réalisation concrète d’un projet, bien connaître les caractéristiques des différents textiles sera une variable déterminante de votre réussite. Vous n’allez, par exemple, pas utiliser la même étoffe pour réaliser une robe de soirée ou une chemise. Jusqu’ici, nous ne vous apprenons rien. Mais le choix de cette étoffe peut être plus compliqué qu’il n’y paraît, puisqu’il en existe une multitude. Alors, quel textile choisir pour créer votre collection ?
Chez feat.coop on s’est donné la mission de vous expliquer les différentes fibres, techniques de fabrication et armures grâce aux savoirs de notre ingénieure textile. Notre objectif est de vous donner les informations qui vous permettront de faire le meilleur choix possible pour vos créations.
Tissu ou tricot : quelle technique choisir ?
Aujourd’hui, nous parlons essentiellement de “tissu”. Or, il s’agit d’un abus de langage. Les tissus sont des textiles fabriqués grâce au tissage. Mais d’autres techniques existent, telles que le tricotage, ou encore le feutrage, et nous allons vous les expliquer.
Différencier ces techniques, et connaître les caractéristiques de chacune facilitera vos choix de textile pour vos collections.
Le tissage
La création du tissu se fait par le tissage. Il s’effectue sur un métier à tisser, dont vous pouvez voir le fonctionnement sur cette vidéo :
Les caractéristiques du tissu sont qu’il a une bonne résistance, une faible capacité d’allongement, et peu de retrait, c’est-à-dire que le tissu ne se rétracte pas.
Selon la façon dont vont être entrecroisés les fils de chaîne et les fils de trame, le tissu aura une armure différente. Les trois types d’armures sont la toile, le sergé (twill en anglais), et le satin. Pour les reconnaître, il faut observer le rapport d’armure du tissu. Il s’agit du plus petit échantillon sur lequel le motif d’entrecroisement des fils se reproduit.
La toile
La toile est l’armure la plus utilisée pour les tissus, notamment car il s’agit de la plus résistante. Elle se caractérise par la chaîne qui passe par-dessus et par-dessous chaque fil de trame.
La toile peut aussi se schématiser ainsi :

Les carrés noirs illustrent les fils de chaîne “pris”, c’est-à-dire qu’ils passent au-dessus du fil de trame (ou que les fils de trame passe sous les fils de chaîne).
À partir de cette base, des dérivés de toile ont été inventés comme la toile nattée. Le fil de chaîne passe par-dessus deux fils de trame, puis en dessous de deux fils de trame, et ainsi de suite.

La gaze, la mousseline ou l’organza sont des tissus toile. Ce qui les différencie les unes des autres ce sont les fils utilisés (ce qui nous renvoie au choix des matières), ainsi que la densité, qui se définit selon le “serrage” entre les différents entrecroisements. Plus le tissage est serré, plus il est dense.

Le sergé
Le sergé s’identifie car l’entrecroisement des fils lui donne un effet de diagonale. Le motif se décale à chaque fil de trame. Notre schéma va vous permettre de mieux comprendre :

Ici, le fil de chaîne est pris par-dessus trois fils de trame, puis passe par-dessous un fil de trame.
Pour bien reconnaître un sergé il faut donc pouvoir observer un motif qui se décale d’un (ou plusieurs) fil de chaîne à chaque fil de trame.
Mais le motif peut par exemple être un fil de chaîne pris par cinq fils de trame, puis qui passe en dessous de trois fils de trame.
Cette photo est celle d’un de nos sergés, ou vous pouvez bien observer cet effet “diagonale”.

Le satin
Le satin s’identifie lorsque sur un rapport d’armure, pour chaque fil de trame, seulement un fil de chaîne est pris. Le fil de chaîne pris doit aussi être le seul à être pris à la verticale. Ce fil de chaîne pris est donc le seul à être pris à l’horizontal et à la verticale sur le rapport d’armure. La dernière spécificité est que deux fils de chaîne pris ne peuvent pas se toucher, il faut qu’il y ait toujours un décalage d’au moins un fil de chaîne non pris avant qu’un autre puisse être pris. Notre schéma va vous aider à comprendre :

Ici, vous voyez bien que les fils de chaîne pris (les cubes noirs), sont à chaque fois les seuls à l’être à l’horizontale et à la verticale. Vous voyez aussi bien qu’aucun fil de chaîne pris n’est en contact avec un autre.

De par cette spécificité, le satin est une armure plus fragile que les autres, mais c’est ce tissage qui lui donne cette apparence scintillante.
Le tricotage
La création d’un tricot se fait par le tricotage. Il se fait sur un métier à tricoter et consiste en la création de boucles, les mailles, qui vont s’entrelacer les unes aux autres.
Les caractéristiques du tricot sont qu’il est plus extensible et qu’il peut avoir plus de relief que le tissu. Il est aussi plus sujet aux déformations et moins résistant.
On utilise surtout les mailles cueillies et les mailles jetées.

Il existe un très grand nombre de mailles, mais nous avons sélectionné celles qui sont le plus utilisées dans le monde de la mode pour vous les expliquer.
Le jersey
Le jersey est une maille cueillie classique. Elle est beaucoup utilisée dans l’habillement, que ce soit pour les hauts, les jupes, les robes ou encore les pantalons. Il a l’avantage d’avoir une bonne élasticité.
Le molleton
Le molleton est une maille cueillie principalement utilisée pour faire des sweats ou des pantalons de jogging. C’est aussi une maille avec une bonne élasticité, et il est souvent gratté et rasé pour lui donner un aspect plus doux.
La polaire
La polaire est aussi une maille cueillie, grattée et rasée. Elle est principalement utilisée pour les vestes, les vêtements de sport et les vêtements d’intérieur. Les avantages de la polaire sont qu’elle dispose d’une bonne capacité d’isolation thermique, et d’une bonne élasticité.
La côte
La côte est une maille cueillie. On retrouve des côtes une-une, mais aussi une côte deux-deux, ou quatre-quatre, selon l’esthétique voulu. Cette maille est surtout utilisée pour les cols, les manches, ou le bas des pulls.
L'interlock
L’interlock se compose de successions de mailles côte, en alternant le sens des boucles (la première ligne commencera par une boucle basse, puis la ligne suivante par une boucle haute). Il est surtout utilisé pour la lingerie et les doublures. C’est un tricot épais, dont les bords ne s’enroulent pas, ce qui facilite son utilisation.
La maille piquée
La maille piquée est la maille principalement utilisée pour produire des polos.
Le feutrage
Le feutrage est la troisième technique de fabrication de textile. Il n’est ni tissé ni tricoté. Cette technique consiste en l’application de chaleur, de pression et d’une friction sur de la laine humide pour obtenir une étoffe.
Bien choisir sa matière première
Maintenant que nous vous avons exposé les particularités entre les différentes techniques de production du textile, il est important de connaître les différentes fibres. Aujourd’hui, les textiles peuvent être faits à base de fibres naturelles (végétales ou animales), mais aussi de fibres artificielles et synthétiques. Chacune de ces fibres a des caractéristiques différentes, et les connaître vous permettra de choisir le textile pour créer votre collection.

Les matières naturelles
- Les fibres végétales
Le coton
Le coton que nous utilisons dans l’industrie textile est issu des fleurs de coton. Originellement cultivé en Inde, aujourd’hui les cotonniers se trouvent majoritairement en Asie et en Afrique. On retrouve quelques cultures en Europe, notamment en Grèce, Espagne (https://agriculture.ec.europa.eu/farming/crop-productions-and-plant-based-products/cotton_fr) et Turquie (https://turkpidya.com/fr/l-agriculture-en-turquie/#Cultures_industrielles_cultivees_en_Turquie). Le coton a de nombreux avantages : il a une très bonne capacité d’absorption, il est très doux et hypoallergénique ce qui le rend confortable. De plus, sa capacité à se déformer fait qu’il s’adapte bien au corps. L’inconvénient du coton est qu’il se froisse facilement.
Le lin
Le lin à l’avantage d’être produit en Europe (la France est d’ailleurs le premier producteur mondial, https://www.linportant.fr/le-projet), et nécessite beaucoup moins d’eau et de pesticides que le coton. Il est aussi deux fois plus résistant que ce dernier et possède de nombreuses qualités : il a une bonne qualité d’absorption (même si légèrement inférieure à celle du coton), et c’est un très bon thermorégulateur : l’hiver il garde la chaleur, et l’été il la laisse sortir et ne tient pas chaud. De plus, il ne bouloche pas et est également hypoallergénique. Le lin a tout de même quelques inconvénients puisqu’il est moins dense, plus rêche et se froisse plus que le coton.
Le chanvre
Le chanvre se cultive aussi en Europe. La coopérative Virgocoop projette d’ailleurs de reconstituer une filière chanvre en Occitanie. Sa culture ne nécessite que peu d’eau et de pesticides, et ses caractéristiques se rapprochent de celle du lin. Il est deux fois plus résistant que celui-ci (donc quatre fois plus que le coton) et a l’avantage de ne pas se froisser ni de se déformer. Les différences avec le lin sont qu’il bouloche et est plus terne.
- Les fibres animales
La soie
Originaire de Chine, la soie est une fibre issue des cocons du Bombyx. La soie est une matière noble, et très chère, mais elle dispose de beaucoup d’avantages. D’abord, elle est très résistante, infroissable, confortable, hypoallergénique, douce et très esthétique puisqu’elle est scintillante. Elle dispose aussi d’un très bon pouvoir thermique. Les inconvénients sont bien sur son prix de production, mais aussi le fait qu’elle est très fragile, et demande énormément de traitements pour être teinte. Il ne faut aussi pas oublier l’exploitation animale qui y est liée.
La laine
Les hommes utilisent la laine depuis des millénaires. Aujourd’hui il en existe plusieurs centaines de variétés (autant de variétés que d’espèces de moutons, mais aussi l’alpaga, le lama, la chèvre…). C’est la fibre la moins résistance des fibres naturelles (même si cette résistance dépend du type de laine utilisée). Les avantages de la laine sont son pouvoir isolant, la laine tient chaud ou isole de la chaleur selon la température extérieure. Elle absorbe aussi très bien (elle peut absorber 40% de son poids en eau avant de paraître mouillée). Elle est peu froissable, anallergique, très résistante et autonettoyante. Les inconvénients de la laine sont majoritairement liés à son élevage qui est très polluant, et qui exploite souvent violemment les animaux.
Les matières chimiques
L'acide polylactique (PLA)
Le PLA est un biosynthétique. Il est fabriqué à base de glucose fermenté en acide lactique, dont une réaction chimique le transforme en acide polylactique.
Son touché se trouve entre le coton et le polyester : il est plus respirant et absorbant que le polyester, mais il l’est moins que le coton. Le PLA a aussi l’avantage d’être bactériostatique, et de se recycler facilement.
Les fibres cellulosiques
Les fibres cellulosiques composent les matières artificielles. Elles sont produites par une réaction chimique entre un composant naturel (la pulpe de bois) et un solvant.
On retrouve notamment la viscose dont les caractéristiques se rapprochent beaucoup du coton. Elle est douce, confortable, dispose d’une bonne absorbance, ne bouloche pas et est peu froissable. Pour la différencier du coton, il faut regarder la fibre mouillée : si elle se casse en l’étirant, il s’agit de viscose, si non, c’est du coton.
Le lyocell est aussi une fibre cellulosique. Il se rapproche de la viscose, mais dispose d’un peu plus d’élasticité. Son usage peut par exemple éviter l’ajout d’élasthanne.
L'élasthanne
L’élasthanne est produit à partir de pétrole. Sa caractéristique principale est son élasticité, c’est pourquoi on le retrouve rarement seul (excepté pour les collants). Il est souvent mélangé à d’autres matières pour leur donner de l’élasticité. On peut citer l’exemple des jeans slim.
Le polyester
La réaction chimique entre plusieurs composés pétrole permet la création du polyester. Une fois que la polymérisation a eu lieu, le mélange liquide passe à travers une filière, des filaments en ressortent. Ils sont refroidis, étirés, on leur applique une torsion, ce qui nous donne un fil, qui sera tissé, tricoté ou feutré.
Le polyester est peu cher, il ne se déforme pas, et il ne se froisse pas. Il est résistant et léger à la fois. Le polyester sèche également très vite car il n’absorbe pas l’eau, mais cela signifie qu’il n’est pas respirant. Il est aussi bactériostatique (il empêche la prolifération de bactéries) mais allergène. Enfin, le polyester a l’avantage de bien se recycler chimiquement, mais il ne se recycle pas mécaniquement.
Le polyamide
Le polyamide ressemble fortement au polyester, en plus élastique et plus froissable. C’est aussi une fibre légère et résistante. Le polyamide a aussi l’avantage d’être imperméable à l’eau, du moins dans une certaine mesure.
Mais alors, quel textile choisir pour faire quoi ? Voici notre guide (non-exhaustif) des textiles à privilégier pour vos créations
Nous vous proposons un schéma récapitulant quelles matière et armure peuvent être opportunes pour la production d’une robe, d’une chemise, d’une jupe, d’un pantalon et d’un maillot de bain.
